dimanche 3 mai 2009

La pensée contestataire, dernière trouvaille de l'industrie pharmaceutique

Mais qui sont donc exactement ces « Empêcheurs de penser en rond », au catalogue si singulier, parfois très prestigieux ? Ils sont l'exemple même du tour inattendu que peut prendre le mécénat contemporain. Rien d'étonnant à ce que certaines entreprises accordent des subsides à des opérations artistiques. Mais qu'un grand groupe pharmaceutique parraine une maison d'édition spécialisée dans les ouvrages contestataires et parfois marqués à gauche, voilà qui n'est pas courant. Depuis 1991, la société Synthélabo, filiale de L'Oréal, abrite en son sein cette collection, sorte de « danseuse » intellectuelle, en somme, grandie à l'ombre de l'industrie. Forte d'un catalogue qui commence à s'étoffer, la structure a acquis une relative indépendance depuis un an, sous le nom d'Institut Synthélabo pour le progrès de la connaissance.
C'est Philippe Pignarre, un ancien permanent de la Ligue communiste révolutionnaire, qui est à l'origine du développement de la collection. (...) « L'avantage d'avoir été militant, observe Philippe Pignarre dans un sourire, c'est que l'on connaît pas mal de monde. »
La ligne éditoriale des « Empêcheurs de penser en rond » tient en quelques mots : aller vers ce qui dérange. (...) Selon Philippe Pignarre, la maison jouit d'une indépendance éditoriale absolue, « nous mettons de la pensée dans la médecine, alors que l'industrie pharmaceutique essaie généralement de faire l'inverse », affirme-t-il. Qu'en pensent les dirigeants de Synthélabo ? Du bien, apparemment. Baptisé « le gaucho » par certains, Philippe Pignarre est apprécié, voire admiré. Pour Edwin Nathan, responsable de Synthélabo pour la France et frère du psychologue et psychanalyste Tobie Nathan , l'Institut Synthélabo correspond à l'image que veut renvoyer le groupe, celle d'une entreprise où l'on fabriquerait « bien plus que des médicaments ». (...)

Le Monde, 9 septembre 1998

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